À la redécouverte des grands magasins de Bordeaux

Pour de nombreux Bordelaises et Bordelais, une journée « en ville » est synonyme de shopping dans le quartier de la rue Sainte-Catherine. Mais quelles histoires insolites ou méconnues se cachent derrière ces enseignes ?

Dans le cadre de ce dossier réalisé conjointement avec Invisible Bordeaux et publié sur nos deux sites, nous partons à la recherche des grands magasins d’antan afin d’identifier comment le paysage commercial d’hier contribue aux enseignes d’aujourd’hui. Notre voyage commence aux Galeries Lafayette…

(N’oubliez pas de cliquer sur les images pour les agrandir !)

Les Dames de France / Galeries Lafayette

Le magasin "Aux Dames de France" sur d'anciens cartes postales, précédemment publiées sur le site Commerces Immarcescibles

Le magasin « Aux Dames de France » sur d’anciens cartes postales, précédemment publiées sur le site Commerces Immarcescibles

Les incontournables Galeries Lafayette donc, où l’on distingue clairement sur les murs et certaines vitrines les mystérieuses lettres « DF » ! En effet, pendant plus de 80 ans cet immeuble était celui du grand magasin « Les Dames de France ». Le bâtiment de style néobaroque a été construit en 1900 d’après les dessins de l’architecte Ruben Dacosta et la décoration sculpturale des façades ont été conçues par Gaston Schnegg. Les coupoles aux angles arrondis du bâtiment rappellent celles du magasin Le Printemps à Paris.

Galeries Lafayette

Le magasin était d’abord la propriété des Grands Magasins du Commerce et de l’Industrie (d’où l’inscription le long de la façade côté rue Sainte-Catherine), société anonyme qui a fait faillite en 1902, un an après l’ouverture du magasin. Racheté par la société Paris-France, le nouveau magasin Les Dames de France a rapidement connu un succès important. Tout comme les coupoles, le magasin était alors calqué sur les grands magasins parisiens. La marque a disparu vers 1985 après son rachat par les Galeries Lafayette.

Quelques traces du passage des Dames de France et le magnifique baromètre Naudin & Cie, visible à l'une des entrées du magasin

Quelques traces du passage des Dames de France et le magnifique baromètre Naudin & Cie, visible à l’une des entrées du magasin

Nouvelles Galeries

Non loin de là, l’immeuble qui abrite aujourd’hui les magasins Fnac, H&M, Sephora et Go Sport était autrefois les Nouvelles Galeries, ou « les Nougas » pour de nombreux Bordelais. Inaugurées en 1894, les Nouvelles Galeries ont fermé leurs portes en 2000 pour cause d’une trop grande proximité avec les Galeries Lafayette, et victime de la fusion entre les deux marques en 1991.

A gauche, une vieille carte postale nous montre les anciennes Nouvelles Galeries. Précédemment publiée sur Commerces Immarcescibles

A gauche, une vieille carte postale nous montre les anciennes Nouvelles Galeries. Précédemment publiée sur Commerces Immarcescibles

Cet énorme magasin (16 000 mètres carrés) était équipé de toutes les technologies les plus avancées (ascenseurs…) et servit d’inspiration à l’architecte Paul Auscher pour la création du bâtiment des magasins Félix Potin à Paris. Les « Nougas » bordelais s’étalaient sur plusieurs adresses : 54, 56 et 58 rue Sainte-Catherine, 5 rue Miqueu, impasse de la Merci, ainsi que le 54 rue du Cancera… où sur une ancienne façade (désormais adossé par une résidence moderne) on peut encore apercevoir l’inscription « Grands magasins des Nouvelles Galeries » !

Fronton Nouvelles Galeries

Magasin Vert / Le Printemps

Nous voici sur la Place Gambetta et le magasin que beaucoup associeront longtemps à feu Virgin Megastore. L’immeuble, qui date de la fin du 19e siècle, était à l’origine le Magasin Vert (sa devanture était peinte de couleur verte), à savoir une mercerie familiale fondée par les frères Chaumette, d’abord installée au n°15 place Gambetta vers 1854 avant de s’étendre progressivement sur la place et sur les rues Bouffard et des Glacières.

Ex-Virgin

Suite à la première Guerre mondiale, cette enseigne a fusionné avec les magasins Printemps. C’est sous ce nom printanier que le grand magasin de la Place Gambetta a été connu pendant une grande partie du 20e siècle jusqu’à sa fermeture en 1990. Virgin a repris les murs jusqu’en 2013 en faisant l’empire bordelais du CD et du VHS. L’immeuble est aujourd’hui tristement vide…

Marks & Spencer

Nous sommes devant le magasin Galeries Lafayette Hommes qui, pendant cinq petites années de 1996 à 2001, était un magasin Marks & Spencer. Les prédécesseurs de l’enseigne britannique étaient La Redoute avant que ces derniers ne partent au nouveau centre commercial Les Rives d’Arcins à Bègles (ouvert en 1995).

Marks Spencer

Marks & Spencer accueillait en moyenne 11 000 clients par semaine et, à la fin des années 90, a fait d’énormes efforts en matière de publicité avec pour objectif de fidéliser sa clientèle avant le purgatoire des travaux du tramway qui allait perturber l’activité commerciale du centre-ville. Mais la société-mère a pris la décision de fermer tous ses magasins en France. Les 49 salariés de Marks and Spencer-Bordeaux ont appris cette nouvelle inattendue peu avant l’ouverture du magasin le jeudi 29 mars 2000… La presse et la Bourse étaient déjà au courant ! Marks & Spencer a depuis revu sa position et est revenu en France, mais pas encore à Bordeaux.

Parunis / Tati

Notre tour des magasins se termine devant Tati, où se trouvait jadis le grand magasin Parunis, appartenant aux mêmes propriétaires que les Dames de France (devenues, souvenez-vous, Galeries Lafayette). Le grand magasin a d’abord ouvert en 1887 sous le nom Grand Magasin du Bon Marché, avant d’être donc repris en 1903 par Paris-France. Le magasin est alors devenu « Paris-Bordeaux » puis Parunis.

Parunis

Le bâtiment a été en grande partie détruit en 1986 dans le cadre de fouilles archéologiques qui sont largement documentées . Les restes de trois sites significatifs ont été découverts : d’abord le couvent des Grands Carmes (du 13e siècle, vendu et détruit à la Révolution) ; ensuite, une petite maison romaine, du premier siècle après Jésus-Christ ; et enfin un « mithraeum », temple du dieu Mithra, avec une remarquable statuaire. De nombreuses pièces trouvées sont exposées au Musée d’Aquitaine, notamment une magnifique rosace gothique de l’église des Grands Carmes et un fragment de vitrail du couvent.

Musée d'Aquitaine

Ainsi s’achève notre sortie « shopping » à fort accent historique. Merci à vous de nous avoir accompagnés sur ce parcours et merci à Jean-Paul Devienne d’avoir autorisé l’utilisation des photos anciennes parues d’abord sur son excellent site Commerces Immarcescibles.

Un commentaire

  1. Très bon article et très bon blog cher collègue historien ! J’ajoute un lien sur le mien. Faites-y un tour à l’occasion. 😉

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